Être au Monde

- et autres tenTatives

PERFORMANCE IN SITU, ITINERANTE, EN ESPACE DE PLEINE NATURE

Katell Boisneau en création à San Gavinu Di Tenda (Corse) © Photo : Matthieu Tomi

Sortie (prévisionnelle) de création : Printemps 2025

Auteure et Interprète : Katell Boisneau
Dramaturgie & mise en scène : Pierre Tallaron
Installation sonore : Matthieu Tomi

Création soutenue par Archaos - Pôle Cirque Méditerranée & La Cascade - Pôle National Cirque

NOTE d’INTENTION

« Enigme parmi les énigmes, la manière humaine d'être vivant ne prend sens que si elle est tissée aux milliers d'autres manières d'être vivant que les animaux, végétaux, bactéries, écosystèmes, revendiquent autour de nous. L'énigme toujours intacte d'être un humain est plus riche et poignante quand on la partage avec les autres formes de vie de la grande famille, quand on leur prête attention, quand on fait justice à leur altérité. Ce jeu de parenté et d'altérité avec les autres vivants, les causes communes qu'ils font lever en politique vitale, participe de ce qui rend si riche le « mystère à vivre » d'être un humain. »

Baptiste Morizot, Manière d'être vivant - p.35-36

Quand je lis Baptiste Morizot, depuis un bistro à Marseille, je me sens concernée, vivante, en relation au monde, je comprends ma place d'être humain, je ressens le droit et le plaisir d'être au monde, (déchargée de toute morale ou culpabilité.)

Je bois mon café et je repars, droite dans mes bottes, jusqu'au marché. Aujourd'hui, c'est le marché paysan, d'ailleurs. Un bon rendez-vous de citadins.

Vivre, s'entrainer, improviser dans la « Nature », ceci pendant quelques jours, est une expérience dense, vivifiante, qui reconnecte avec l'instant, avec le vivant.

Pendant plusieurs mois ou plusieurs années, l'expérience est plus complexe, plus introspective.

Le soleil se lève, je suis debout sur le mât, en haut d'une falaise surplombant la vallée du Nebbiu, en Corse. J'entends des oiseaux, un âne, un cochon au loin, des coups de fusil, des corbeaux, un groupe électrogène, un homme qui appelle sa bête, son écho, un chien, un enfant qui fait le bruit de la voiture, une tronçonneuse. Une nuée d'oiseaux me frôle. Le paysage s'étend de la montagne à la mer. J'observe, je me dis « c'est beau.... »

Je suis sur l’île depuis un et demi, je m'entraine dehors, j'improvise, je continue mon travail : danseuse, artiste de cirque et harpiste. Je fais mes courses à l'hypermarché de la vallée. Je rencontre la solitude, ou ce qu'on peut traduire par « être éloignée d'une vie sociale et culturelle ».

Pourtant la forêt grouille, le maquis aussi.

Sur le mât, j'éprouve l'air, le vent, la lumière. Je pose des mots, des sensations. Je parle à voix haute.

J'essaie de faire lien avec ce qui m'entoure.

L'espace me paraît immense.

Parmi les oliviers, depuis mon poteau de 6 mètres, j'essaie de sentir que je suis là.

« Je suis là ? Est-ce que je suis là, là ? »

…Silence de vallée

« Comment faire pour me sentir là ? Ramasser du bois. Faire un feu et cuisiner là. Semer des graines. Marcher jusqu'à l'autre village et revenir. Suivre la trace d'un sanglier. Me planter dans le sol et m'enraciner. »

Une liste de tentatives. Je me vois faire. Je ris.

Silence.

Je ris devant le silence.

Je ris seule dans le maquis. Seule sur le chemin.

Silence. Mon silence.

La nature vit. La nature vit à côté de moi.

Comment être là, dans ce petit village, sur une île, et reliée au(x) monde(s) ?

Je me situe sur une carte, je regarde la ligne des cimes.

Je me raccroche au mât comme à la pointe d'un compas.

Comment être au monde ?

Comment faire partie de ce paysage ? Devenir paysage ?

Ces questions naïves et si intimes au début, prennent la dimension d’une quête. Une quête anthropologique et politique.

Katell Boisneau, octobre 2023


MATIÈRES ARTISTIQUES

Être un élément vivant, graphique, sonore, rythmique, être un humain, un geste, un bruissement, une confidence.

Inviter le public dans les recoins du paysages, marcher, écouter, observer, essayer de nous placer dans le temps et l'espace du paysage. Nous décentrer, multiplier nos points de vue.

Faire lien avec la géographie de la région, de la commune. Echanger, partager une expérience avec les habitants, vacanciers, voyageurs présents sur le territoire. Tenter de faire monde.

Porter un regard humoristique sur l'être humain qui cherche sa place, son rôle dans la « grande famille du vivant* » . Il essaie de s'intégrer. Il fait des efforts pour être là, pour être un peu Nature.


NOTE du metteur en scène

“Être au monde, la belle histoire !
Être au monde est une belle histoire, c'est sûr, qu'on choisit de se raconter.

Donna Harraway raconte dans un entretien que l'on naît d'abord dans un paysage d’histoires: histoire nationale, histoire de colonisation, histoire de race, histoire d'exploitation du sol et du sous-sol, histoire des sciences et des technologies, histoire de sexe, de genre, de classe, histoire d'élevage, histoire de nature, ...

À partir de là, comment peut-on « bricoler » avec ce qui vit en nous du monde extérieur: comment chercher le contact, jouer et interagir avec les puissances visibles et invisibles qui composent un paysage ? Comment pister les récits d'un paysages qui peuplent nos imaginaires? Et alors que raconter? Quel sens donner à cette histoire que nous nommons "être au monde"? Dans quel monde est il question d'être? A-t-on vraiment du désir pour lui ? Sont-ils plusieurs ces mondes ? Se définissent ils par les questions qu'on leur pose ?

Et si être au monde c'était davantage faire le choix du comment plus que du pourquoi ?

Comment faisons nous monde ? Voilà la question.
Il n'est plus question d'être ou ne pas être; mais bien de savoir comment être (ou ne pas être). Alors, comment faisons nous monde ?
Indéniablement, par des tentatives.

Être au monde -et autres tentatives- est une oeuvre kaléidoscopique, ou se conjuguent: cirque, documentaire sonore et espaces de pleine nature.

La place du public est cruciale bien sur.
Elle devra rester entière. C'est le regard du spectateur qui fait le paysage.”

Pierre Tallaron

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CRASH AGAIN

Création 2015

 

CRASH AGAIN, un appel à l'urgence de vivre au son rock-grunge-electro.

Un acrobate, un musicien et une acrobate musicienne.

À bout de souffle, ils courent, grimpent, jouent, dansent, chantent avec le vide.

 

Un atelier à ciel ouvert.

D'un rythme efficace et précis, un homme travaille. Il porte, soulève, évalue, pèse et soupèse.

Le corps ancré au sol, les pneus chevillés au corps, il façone encore et toujours.

 

Un homme entre, l'observe, frappe, percute et dompte le caoutchou.

Sa voix résonne comme un écho, un appel.

 

Une femme surgit, s'élance, se hisse, danse, s'essouffle au confins de ses limites.

Elle s'allège de toutes ses forces.

 

Tentative d'une rencontre.

En quête de sens, ils tissent un chant commun.

Techniques de cirque

Acrobatie, mât-chinois et pneus

Musique

Construire et démolir des rythmes, jouer avec l’imprévu, prendre des risques. La musique de Crash Again se joue en direct, au milieu des pneus, avec les pneus. Une guitare, une basse, une batterie « en pneus », du chant, une harpe : tout est bon pour alimenter un son «rock-grunge-electro». Les riffs se suivent, s’empilent au rythme des tours qui se dressent et s’écroulent. Les sons joués se mélangent parfois aux «samples organiques» (enregistrés au plus prêt des deux acrobates. Le bruit de leurs pas, ou celui deleurs respirations, le grincement des pneus, la vibration du mât, etc...).

Katell joue de la harpe, chante. Matthieu joue de la guitare baryton, de la basse, de la « batterie pneu », chante et se sample en direct.

Distribution

CRASH AGAIN est une création collective de

Katell Boisneau : acrobate et harpiste

“Otto” Fodé Camara : acrobate

Matthieu Tomi : musicien-compositeur

Guy Carrara : metteur en scène

avec le regard extérieur de Nacer Belhaoues

Création Lumière : Philippe Da Silva

 

Note du metteur en scène

Lorsque Katell et Otto m’ont demandé de faire la mise en scène de leur futur spectacle, j’ai immédiatement accepté avec enthousiasme.

La concrétisation de leur amitié artistique par la mise en œuvre d’un projet qui a muri pendant plusieurs années jusqu’à la création de leur compagnie est une absolue nécessité pour ces deux artistes

Ils proposent un univers insolite qui rassemble leurs ressentiments, leurs émotions d’artiste et leurs points de vue sur l’individu et ses contradictoires nécessités de solitude et d’obligation de socialisation.

Le langage du cirque leur permet de parler de solidarité, de détermination dans l’effort, d’opiniâtreté jusqu’à l’épuisement.

Les premières recherches que nous avons effectuées ensemble nous permettent d’envisagerune écriture progressive en aller-retour entre le plateau et le scénario.

Guy Carrara